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1 - Définitions : bienheureux et saints ; martyrs et confesseurs

Si Dieu seul est saint, la lumière de Dieu peut être reflétée comme la lune reflète la lumière du soleil, si l’on est suffisamment transparent à la vie du Christ en nous par l’Esprit Saint. La lune n’émet pas mais diffuse, réfléchit, transmet la lumière solaire, seule source dans le Père. Nous adorons Dieu seul mais vénérons les saints. Un saint est donc quelqu’un qui, non seulement est certainement au Paradis à contempler dans son âme Dieu face à face, mais en plus est digne d’être imité. Il est encore un intercesseur efficace auprès de Dieu pour nous les vivants en chemin vers Lui, permettant d’obtenir de Dieu grâces et faveurs. « Et qu'il nous soit donné de nous retrouver, larrons heureux, en paradis, s'il plaît à Dieu, notre Père à tous deux » (Testament spirituel de Christian de Chergé).

Les procès aboutis traversent deux grandes étapes :

  • la béatification (bienheureux, beatus en latin). À ce niveau là, le culte s’inscrit sbeatification chapelle dans lancien pressoirurtout dans un diocèse ou une congrégation religieuse ;
  • la canonisation (saints inscrits dans la liste, kanon en grec, des saints). Par cet acte, l’Église universelle s’engage.

Il existe deux catégories de procès d’un serviteur de Dieu suivant le type de mort :

  • martyr : la personne meurt pour Jésus Christ à cause de la foi ou de vertus liées à l’exercice de celle-ci. Procès sur le martyre (acte). C’est l’imitation du Christ jusque dans la mort.
  • mort non violente. Dans ce cas, le procès portera sur l’exercice héroïque des vertus. Ils sont confesseurs de la foi (ils la professent par leur vie).

2 - De quoi s’agit-il pour les moines de Tibhirine ?

Il s’agit de la cause de canonisation, comme martyrs, de 19 serviteurs de Dieu (religieux, religieuses, prêtres, évêque) qui ont été tués en Algérie de 1994 à 1996 (période dans laquelle le peuple algérien lui-même a connu des moments de violence extrêmement douloureux et tragiques avec plus de 150.000 morts particulièrement des villageois innocents).

3 - La liste des serviteurs de Dieu tués en Algérie et pour lesquels une cause est en cours :

  1. Le Frère Henri Vergès des Frères Maristes et la Sœur Paul-Hélène Saint-Raymond des Petites Sœurs de l’Assomption, tués ensemble à Alger, le 8 mai 1994.
  2. Deux sœurs Augustines Missionnaires, Sœur Caridad Alvarez Martin et la Sœur Esther Paniagua Alonso, tuées le 23 octobre 1994, sur la route tandis qu’elles se rendaient à la messe dominicale.
  3. Quatre Pères Blancs, tués le 27 décembre 1994 à Tizi-Ouzou, tandis qu’ils fêtaient ensemble leur confrère Jean Chevillard. Ces pères sont Jean Chevillard, Alain Dieulangard, Charles Deckers et Christian Chessel.
  4. Deux Sœurs de Notre Dame des Apôtres : Jeanne Littlejohn ou Soeur Angèle Marie et Denise Leclercq ou Soeur Denise. Elles ont été tuées le 3 septembre 1995, alors qu’elles sortaient de la messe du dimanche.
  5. Sœur Odette Prévost, des Petites Sœurs du Sacré Cœur, a été tuée à Alger, le 10 novembre 1995, tandis qu’elle se rendait à la messe.
  6. Le groupe le plus nombreux est formé par les six Frères Trappistes du monastère de Tibhirine : Christian de Chergé, le prieur, Frère Luc Dochier, le médecin, Père Christophe Lebreton, Père Célestin Ringeard, Frère Michel Fleury, Frère Paul Favre-Miville plus le Père Bruno Lemarchand, de l’annexe de Fès, qui se trouvait à Tibhirine de passage pour l’élection du prieur. Ils ont été pris en otages la nuit du 26 mars 1996 et ils vont vivre cette situation pendant de longues semaines. On ne retrouva que leurs têtes, le 21 mai 1996.
  7. Le dernier du groupe est Monseigneur Pierre Claverie, évêque d’Oran, tué à Oran le 1er aout 1996.

4 - Pourquoi a-t-on voulu introduire la cause ?

Le Postulateur donne deux éléments de réponse :

  1. Les diverses familles religieuses se sont trouvées devant des signes évidents de renommée du martyre et de sainteté. Ces familles, comme les autorités religieuses d’Alger, se sont senties interpellées par l’impact que ces morts avaient dans le peuple de Dieu.
  2. Nous étions aussi devant des hommes de dialogue, des chrétiens qui vivaient dans la maison de l’Islam pleins de respect et avec beaucoup d’amis musulmans et parfois priant avec eux. Ces martyrs sont des têtes de pont du dialogue et du vivre ensemble dont l’Eglise et le monde d’aujourd’hui ont besoin. Ce n’est pas pour rien qu’ils sont morts dans le même drame que des dizaines de milliers d’Algériens musulmans ».

5 - Comment a-t-on procédé pour ouvrir la cause ?

Suite à cette réflexion menée en commun, les familles religieuses de ces 19 serviteurs de Dieu ont souhaité ouvrir la cause. Avant d’arriver à ce stade, ces familles religieuses ont recueilli les écrits des martyrs, des témoignages sur eux, des documents qui leur ont appartenu, comme aussi les signes de la renommée de martyre. Des biographies ont été produites.

Pour introduire la cause, un Postulateur a été nommé : le Frère Giovanni Maria Bigotto, des Frères Maristes (le 06 juin 2005).

Puis, Monseigneur Teissier a procédé à la nomination d’un Tribunal diocésain :

  1. Le Père Dominique Motte, dominicain a été nommé juge délégué ;
  2. Le Père Jean Pierre Henry a été nommée Promoteur de justice,
  3. Et la Sœur Françoise Dillies secrétaire.

Enfin, il a fallu trouver et nommer des historiens pour la recherche des documents, ainsi que des censeurs théologiens pour leur demander de lire les écrits des martyrs.

6 - L’acteur de la cause

L’acteur de la cause est celui qui en est responsable devant la Congrégation pour les causes des saints à Rome. L’acteur de la cause est, en l’espèce, l’archevêque d’Alger. Après Monseigneur Teissier, ce fut Monseigneur Ghaleb Bader et actuellement c'est le nouvel archevêque d’Alger : Monseigneur Desfarges.

7 - Ouverture de la cause

Elle a eu lieu le 4 octobre 2007, matin, dans l’église de la Maison de la Mission à Alger. C’est Monseigneur Henri Teissier qui présidait à l’ouverture, avec le chancelier du diocèse et le vicaire général. Les membres du Tribunal diocésain et le postulateur étaient présents dans une église pleine de fidèles.

8 - La cause dans sa phase diocésaine :

beatification vitrail

Tout d’abord, les témoins ont tous été entendus et les documents liés aux 19 serviteurs de Dieu ont été collectés par la Commission Historique pour la cause des 19 martyrs de l'Algérie.

Puis ce fut le long travail de lecture de ces écrits menés par la Commission Historique, et ponctué de plusieurs réunions d’avancement. L’aboutissement en est une vingtaine de gros dossiers très riches, très documentés qui sont un point essentiel de l’évolution de l’instruction de la cause.

Suivant le souhait du Secrétaire et du Sous-secrétaire de la Congrégation pour les causes des saints à Rome, les ultimes  séances de cette phase diocésaine ont eu lieu à Rome en leur siège, ce qui est un signe fort.

Et du 1 au 3 février 2012, s’est donc tenu à Rome, la dernière réunion de cette Commission Historique qui marque donc la fin des travaux de la phase diocésaine.

9 - Phase romaine

Nomination d’un Postulateur de la cause des 19 martyrs d’Algérie :

beatification signet 19 martyrs

Fin 2013, Père Thomas Georgeon, a été nommé par Mgr Bader, Archevêque d’Alger, Postulateur de la cause des 19 martyrs d’Algérie (dont les sept Frères). Moine de la Trappe, Abbé émérite de Frattocchie (Italie), auteur avec Christophe Henning de la biographie de Frère Luc (Bayard), ancien Secrétaire de l'Abbé Général de l'Ordre des Cisterciens de la Stricte Observance (Trappistes) à Rome pendant trois ans, le Père Thomas est actuellement à la Grande Trappe de Soligny (Orne)

Quelle est sa mission ?

Après l’achèvement du « procès diocésain » (cf ci-dessus), tous les actes ont été remis à la Congrégation des Causes des Saints au Vatican.

Après vérification de la procédure canonique, très stricte, la phase romaine s’est ouverte par un décret de validité et la nomination d’un relateur et d’un postulateur (le premier, membre de la Congrégation étant là pour assister le Postulateur dans son travail et en valider les différentes étapes). Le Postulateur doit rédiger une « positio » résumant toute l’argumentation fournie lors du procès diocésain. Sachant que les documents du procès diocésain comportent plus de 6000 pages, ce travail de synthèse prend du temps. Pour être aidé, il peut nommer des vice-postulateurs (trices).

Ensuite, une fois remis la Positio à la Congrégation, s’ouvre le procès proprement dit ; devant les cardinaux et évêques de la Congrégation, le postulateur doit justifier que les personnes sont dignes d’être reconnues comme martyrs morts en « haine de la foi », un « promoteur de justice » étant, lui, chargé d’apporter la contradiction. Au terme de ce procès, les membres de la Congrégation rendent leur verdict à la suite d’un vote.

La récente préface du pape François à l'ouvrage Tibhirine, l'héritage (sorti en avril 2016) montre l'intérêt du Saint-Père pour cette cause. 

Lire le témoignage de Dom Thomas Georgeon, postulateur de la cause de béatification, en mai 2015

La positio (environ 1100 pages) a été mise à l'étude par la Congrégation de la Cause des Saints dès janvier 2017 et en mai de cette même année ses experts théologiens ont donné un vote unanime en faveur du martyre. En novembre 2017, la positio a été remise au collège de 15 cardinaux et évêques consulteurs de la Congrégation des causes des saints.

Les conclusions de celle-ci et le vote des cardinaux devraient intervenir fin janvier 2018.

Lire l'interview de Mgr Desfarges, archévêque d'Alger , en octobre 2017

 

10 - décret de beatification :

  • Samedi 27 janvier 2018 : Le Saint Père a signé le décret portant sur la béatification de « Mgr Pierre Claverie et de ses 18 compagnons et compagnes martyrs ».."Il y a 19 nouveaux intercesseurs qui accompagnent encore de plus près l' Eglise et le peuple d’Algérie. Alléluia !"..

Lire la publication du service officiel d'information du Vatican.

Lire le Communiqué des évêques d’Algérie.

  • Dimanche 9 septembre 2018 , communiqué des évêques d'Algérie : La célébration de la Béatification de Monseigneur Claverie et de ses 18 compagnons aura lieu le samedi 8 décembre 2018, Solennité mariale, en la Basilique de Santa Cruz à Oran