Bienvenue sur le site dédié aux moines de Tibhirine

Le 21 mai 1996, sept moines trappistes étaient assassinés en Algérie. Leur mort a soulevé l’émotion de la communauté internationale. Le testament spirituel de frère Christian de Chergé résonne aujourd’hui comme l’un des grands textes du XXème siècle. Cette petite communauté de l’Atlas vivant en proximité avec ses voisins algériens est allée jusqu’au bout de l’amitié et de la fidélité à une vie monastique plantée en terre d’Islam. Ce qui a fait vivre cette communauté continue d’inspirer bien des hommes et des femmes aujourd’hui, de tous horizons, aspirant à vivre cette fraternité qu’ils ont signée de leurs vies. Sous l'égide de "l'Association des écrits des 7", regroupant les familles, les amis et l'Ordre Cistercien de la Stricte Observance, ce site voudrait aujourd’hui leur rendre hommage et permettre de faire connaître leurs écrits et leur actualité à travers les événements, les créations artistiques, les publications, l'approfondissement spirituel et la méditation…

À découvrir

Le point sur Tibhirine

Il y aura bientôt quinze ans que nos frères de Tibhirine ont été assassinés.  Ils ne cessent d’être présents dans la mémoire de leurs familles et de leurs frères et soeurs de l’Ordre cistercien, mais aussi dans celle d’un public beaucoup plus large. Le message de leur vie et des écrits de certains d’entre eux demeure pour beaucoup une source d’inspiration et est devenu pour certains un sujet d’étude. L’enquête sur les circonstances de leur mort se poursuit à son propre rythme avec, de temps à autre des rebonds. Le film Des hommes et des dieux, a eu un succès inattendu.

Faisons un peu le point...

A) Le film

Le scénariste Étienne Comar et le producteur Xavier Beauvois ont eu la sagesse de centrer le film sur la vie monastique des moines et sur ce qu’ils ont vécu durant les trois dernières années de leur vie -- qui fut une période de violence extrême en Algérie -- en relation avec la population musulmane qui les entourait. Il ont choisi, à juste titre, de ne pas aborder – en tout cas pas directement – la question de l’identité de leurs ravisseurs.

Le succès du film réside non seulement dans le nombre de personnes qui l’ont vu, mais aussi, et surtout, dans la façon à peu près unanimement positive dont il a été reçu, aussi bien dans les milieux non-croyants que dans les milieux croyants. Les palmes n’ont pas manqué pour venir souligner ce succès.

Ce film semble être venu comme une grâce pour notre Société et notre Église dans les temps actuels.

B) Les frères

Les publications des dernières années avaient fait connaître surtout Christian et Christophe, qui avaient laissé des écrits.  Le film a mis en lumière la figure de Luc, et on peut s’en réjouir, car Luc a été l’âme de Tibhirine durant cinquante ans. Le film, ainsi que d’autre publications ont aussi permis de connaître un peu mieux les autres frères.

Amédée nous a quittés l’an dernier.  Jean-Pierre, qui a toujours gardé une grande discrétion, a donné récemment un interview d’une très grande beauté et d’une très grande profondeur dans le journal Le Figaro. Cet interview a rappelé à tous que la communauté Notre-Dame de l’Atlas n’a jamais cessé d’exister, et qu’elle existe toujours à Midelt, au Maroc, où une toute petite communauté continue de vivre ce qu’ont vécu nos frères à Tibhirine.

C) L’enquête

S’il était bon que le film concentre son attention et celle des spectateurs sur ce qu’ont vécu les moines et sur leur message, l’enquête judiciaire se poursuit et il est important que la quête de la vérité ne s’arrête pas.

Je compte faire le point sur cet enquête dans un texte séparé.  Qu’il suffise de dire ici que le juge Marc Trévidic la mène avec une grande rigueur professionnelle. Il n’a jamais indiqué sa préférence pour une hypothèse plus que pour une autre, mais n’en exclut aucune.  Il a jusqu’ici interrogé un assez grand nombre de témoins, en particulier des personnages importants du gouvernement français en place à Paris ou à Alger à l’époque des faits. Il a analysé les documents venus d’Alger comme réponse à la Commission rogatoire qu’y avait envoyée son prédécesseur, le juge Bruguière, et qui avaient été versés au dossier.  Il a aussi analysé un bon nombre d’enregistrements audio et vidéo – essentiellement des témoignages de repentis – envoyés également par Alger, mais que le juge Bruguière avait laissés dans son coffre-fort sans les verser au dossier.  Il a obtenu que quelques documents classifiés « secret défense » soient déclassifiés, mais il est en attente de beaucoup d’autres, plus importants. Il lui reste à entendre plusieurs personnes du côté algérien.  Il a surtout l’avantage de connaître beaucoup d’autres dossiers qui apportent des lumières sur celui-ci.

Le juge Trévidic vient d’écrire un livre : Au coeur de l’antiterrorisme (JCLattès, 2011) extrêmement intéressant, qui révèle la complexité de ce genre d’enquête.  On y trouve un chapitre où Trévidic  décrit ce qu’il a ressenti en voyant le film Des hommes et des dieux. Ce chapitre révèle surtout les qualités d’homme et la grande sensibilité de ce juge breton.

D) Le témoignage du général François Buchwalter

François Buchwalter était attaché militaire auprès de l’ambassade française à Alger au moment de la mort des moines. C’est un militaire d’une grande rigueur professionnelle, qui n’a jamais cherché de publicité.  À l’époque des faits il a appris certaines choses de la part de collègues militaires. Il a communiqué ces informations à ses supérieurs hiérarchiques à Paris et en a parlé confidentiellement à l’époque à quelques personnes à qui ces informations pouvaient être utiles.  Il a ensuite gardé le silence.  Convoqué devant le juge d’instruction Trévidic l’an dernier, il a répété ce qu’il avait mis dans son rapport envoyé à Paris à l’époque des faits. Ce rapport est l’un des documents importants qu’on ne retrouve pas au ministère.

Il n’a jamais défendu une thèse.  Il a tout simplement rapporté une information qu’une personne de confiance et sérieuse lui avait rapportée.  C’était que la mort des moines était due à une bavure de l’armée, ceux-ci ayant été tués lors d’une attaque par hélicoptère de l’armée algérienne contre une base du GIA. La chose n’est pas impossible, contrairement à ce que plusieurs ont immédiatement écrit, car divers témoignages trouvés dans les enregistrements du « coffre-fort du juge Bruguière » décrivent des opérations semblables et les documents déclassifiés provenant de l’ambassade d’Alger parlent de telles opérations à l’époque de la mort des moines.

D’autres témoignages indépendants recueillis récemment, tout comme les bruits qui circulaient en Algérie à l’époque, tendent à démontrer que cette version de la « bavure » était la version que l’armée algérienne voulait faire circuler. On peut se demander pourquoi. Plus d’une personne a fait remarquer que l’état des têtes telles qu’elles ont été retrouvées ne semble pas compatible avec cette hypothèse. On ne peut donc pas exclure que cette information était voulue par l’armée comme une forme de désinformation pour cacher autre chose.

Quoi qu’il en soit, le général Buchwalter n’a jamais défendu cette thèse.  Il a simplement rapporté le « fait » que cette information lui avait été fournie. Il était important que ce fait soit déposé à l’enquête.  Et il l’a fait parce que le juge lui a demandé de le faire. On s’étonne que certaines personnes sentent le besoin de « défaire la thèse du général Buchwalter ».

E) Les dissidents et les repentis

Du côté algérien, deux catégories de personnes ont fait des déclarations au fil des années, d’une part des membres de la Sécurité Militaire algérienne ou des services secrets algériens, qui ont fait défection, et qui tendent à incriminer ces services, et, d’autre part, des repentis, qui tendent à incriminer les islamistes.

Les motifs qui ont poussés certains membres des services secrets à faire défection sont évidemment divers.  La réaction du régime en place est évidemment toujours de les discréditer totalement, et pour cela ils produisent à leur tour de nombreux témoins à charge contre ces témoins embarrassants.  Il serait pour le moins naïf de prendre pour du pain bénit tout ce qu’affirment ces témoins à charge.

L’une des armes utilisées par les services secrets algériens comme par tous les services secrets à travers le monde est celui de l’infiltration des groupes terroristes par des membres des services.  Les « repentis » qui parlent semblent bien être, pour la plupart, non pas des terroristes qui se sont repentis, mais de ces infiltrés qui reviennent à la vie civile (avec souvent une bonne situation de commerçants).

Il est certain qu’en recoupant tout ce qui a été « révélé » par les uns et les autres au cours des années, on a acquis une connaissance beaucoup plus grande du fonctionnement aussi bien des groupes islamistes que de la Sécurité Militaire algérienne et qu’une image de plus en plus claire de ce qui est arrivé à nos moines se dessine.

La seule attitude professionnelle devant cet ensemble de témoignages est celle du juge d’instruction : prendre sérieusement en considération tout témoignage, examiner attentivement sa véracité ou sa fausseté, retenir éventuellement des parcelles de vérité confirmées par d’autres témoignages malgré peut-être certaines incohérences sur des points périphériques.

S’efforcer de décrédibiliser tous les témoignages des dissidents, comme le fait évidemment la presse algérienne liée au régime militaire et certains auteurs français ayant leur thèse à privilégier ne favorise pas la recherche de la vérité.

Les témoignages d’un « repenti » comme Ali Benhadjar, qui n’a cessé de louvoyer et de modifier les versions successives de ses récits au cours des années ne sont certes pas plus crédibles que ceux d’un Abdelkader Tigha. Encore moins celles de son neveu Larbi ben Mouloud, produit par le Régime quelques années après les faits et qui aurait été captif au même endroit que les moines, mais qui n’apporte de cela aucune preuve que ses propres dires, qui ont d’ailleurs varié d’une déposition à l’autre.

F) Un livre récent

René Guitton avait publié en 2001 un premier livre sur Tibhirine (Si nous nous taisons... Le martyre des moines de Tibhirine, Calmann-Lévy 2001).  L’intérêt de ce livre était surtout de faire connaître pour la première fois les négociations entamées par Marchiani et la DST pour essayer de libérer les moines. Jusqu’alors les autorités françaises avaient toujours dit qu’il n’y avait pas eu de négociations. En communiquant ces informations à Monsieur Guitton les autorités françaises – essentiellement la DST – reconnaissaient implicitement qu’il y avait bien eu des négociations, dont la négation n’était plus crédible.

Au moment du quinzième anniversaire de la mort des moines, René Guitton publie un nouveau livre qui est censé une fois de plus apporter toute la lumière (En quête de vérité. Le martyre des moines de Tibhirine, Calmann-Lévy 2011). L’ironie du sort veut que le livre paraît quelques semaines seulement après le retour au gouvernement de Monsieur Alain Juppé que le premier livre, d’il y a dix ans, rendait responsable d’avoir fait chavirer les efforts de Marchiani pour faire libérer les moines.

Un premier examen de ce livre révèle que les « nouveaux » documents que nous révèle Guitton sont essentiellement les pièces déposées au dossier de l’enquête à l’époque où cette enquête était menée par le juge Bruguière et ceux qui ont fuité dans la presse pour la période suivante de l’enquête.

On sait qu’un juge d’instruction doit communiquer toutes les pièces de son enquête au parquet ainsi qu’à la partie civile. Monsieur Guitton n’a pas eu ces documents, en particulier les photos des têtes des moines, de la part de la partie civile.  Il les a donc eus soit du parquet soit du juge Bruguière lui-mêmes, lesquels, contrairement à la partie civile, sont tenus au secret de l’instruction. (Mais les documents publiés par Wikileaks concernant la façon dont l’ambassade américaine était tenue au courant de l’enquête sur le génocide du Rwanda montrent que le juge Bruguière interprétait fort librement son obligation professionnelle au secret.)

Par ailleurs on doit constater que Monsieur Guitton n’a pas eu accès aux procès-verbaux des auditions plus récentes de nombreux témoins importants de l’État français faites par le juge Marc Trévidic, sauf les quelques éléments parus dans la presse. Il n’a pas eu accès non plus à la transcription des bandes enregistrées  – essentiellement des témoignages de « repentis » ayant été liés au sort des moines – que les autorités algériennes avaient transmises au juge Bruguière et que celui-ci, au moment de sa démission, avaient laissées dans son coffre-fort sans en prendre connaissance et, en tout cas, sans les verser au dossier comme il aurait dû le faire.

Je compte analyser dans une autre note ce livre de Monsieur René Guitton qui, contrairement à ce qu’affirme la bande publicitaire sur la couverture du livre, n’apporte vraiment aucune révélation choc. J’ai évidemment remarqué qu’il décrit un bon nombre d’événements me concernant ou que  j’ai vécus personnellement, et dont j’ai gardé une description détaillée rédigée chaque jour.  Ces faits sont présentés dans le livre de Guitton avec une quantité si énorme non seulement d’inexactitudes mais de graves erreurs de faits, faciles à démontrer, qu’on ne sait vraiment quel crédit donner au reste de cette reconstitution des faits à la Sherlock Homes.

Pour le moment je m’arrêterai seulement à son Épilogue, qui est probablement la seule grande nouveauté des 335 pages de ce livre. L’auteur y avance l’hypothèse (une de plus, après avoir déploré qu’il y en avait eu trop) que chacun des moines aurait été exécuté par une balle de révolver qui aurait percé le crâne et serait sortie par la partie inférieure du visage.  Cette hypothèse serait le résultat d’un examen attentif des photos des têtes – photos remises par les autorités algériennes au juge Bruguière et qui se trouvent dans le dossier de l’instruction.  Cela n’est pas tout à fait impossible, mais en lisant cet Épilogue on a l’impression d’être devant un nouveau Da Vinci Code plutôt que devant une enquête judiciaire.

Personnellement j’ai examiné assez attentivement les têtes dans les cercueils et n’ai rien remarqué de semblable.  J’ai aussi examiné les photos en question.  Le juge Trévidic a lui aussi fait examiner ces mêmes photos par un expert en médecine légale – bien avant la parution du livre de Guitton – pour savoir si une autopsie éventuelle pourrait apporter quelque chose.  Bien plus, au moment de la reconnaissance des têtes, le colonel responsable de l’hôpital Ain Nadja nous a très explicitement dit que les têtes avaient été nettoyées et préparées selon les méthodes de la médecine légale, qu’elles avaient été photographiées et radiographiées.  S’il y avait eu cette marque de balle dans chacune des têtes, on ne comprend pas pourquoi les médecins légistes algériens qui ont examiné et traité les têtes et ont rédigé un rapport scientifique de leur examen ne l’auraient pas remarqué et indiqué.  Pour éclaircir ce point les radiographies réalisées par les autorités médicales militaires algériennes, s’il est possible de se les procurer, seraient d’un intérêt beaucoup plus certain qu’une autopsie pratiquée quinze ans après les faits.

Si cette hypothèse de Monsieur René Guitton était confirmée, cela pourrait avoir des conséquences extrêmement sérieuses.  En effet tous ceux qui connaissent un peu les manières de faire des islamistes sont convaincus qu’ils ne peuvent avoir pratiqué ce genre d’exécution.  Ils utilisent toujours l’arme blanche, eux.  De quoi relancer la requête d’Amnistie Internationale et d’autres groupes de défense des droits humains pour une enquête internationale indépendante sur les violences en Algérie durant ces dix années et plus de guerre civile.

Au sujet de la reconnaissance des têtes des sept moines, reste á signaler une autre erreur importante, dont Monsieur Guitton n’est cependant pas le responsable.  Il parle, citant l’ambassadeur Michel Lévêque, du « médecin légiste affecté à l’ambassade ».  Or, il n’y avait ni médecin affecté à l’ambassade française à Alger, ni médecin légiste français en Algérie.  Il y avait tout simplement un jeune médecin affecté à la Gendarmerie française, et auquel faisaient appel en cas de besoin l’ambassade ou les autres autorités françaises en Algérie.  C’est ce jeune médecin qui fut amené à l’hôpital lorsque nous sommes allés  reconnaître les corps. Il avait à ce moment-là tout simplement sa formation de base de médecine générale et, à la demande de l’ambassadeur, il répondit qu’il n’avait aucune compétence en médecine légale. Il était tout simplement présent lorsque le consul et moi avons fait la reconnaissance des têtes avec l’aide de photos que possédait le consul.

Ici je me permets de rétablir la vérité des faits. Il est souvent écrit que la reconnaissance des têtes a été faite par l’ambassadeur français et/ou telle ou telle personne.  En réalité cette identification a été faite par deux personnes : le Consul François Ponge (mais je pensais à ce moment-là qu’il était un secrétaire de l’ambassade !) et moi-même.  C’est ce que le Consul écrivait le soir-même par fax à sa hiérarchie à Paris : « L’adjoint du prieur général et moi-même, avec le concours des personnels hospitaliers, avons pu identifier les dépouilles, notamment à partir des photographies du fichier des immatriculés » (pièce nº 567 du dossier de l’instruction. Durant cette identification, l’ambassadeur et le médecin se tenaient en retrait. Quant à Monseigneur Tessier et à Dom Bernardo Olivera, ils étaient restés avec Père Amédée dans la salle où nous avions été accueillis par le colonel en charge de l’hôpital, car nous ne voulions pas soumettre Amédée à ce spectacle.  Dom Bernardo s’est toutefois approché au moment où le consul et moi terminions la reconnaissance, et nous avons de nouveau regardé ensemble rapidement les sept têtes.

Dans la même communication à Paris, ce soir-là, le consul disait aussi qu’il attendait de recevoir le rapport des médecins légistes algériens avant de rédiger les actes officiels de décès, dont la date restait incertaine.  Il obtint ce rapport deux jours plus tard.  Ce rapport fut alors envoyé à Paris par l’ambassadeur français comme étant le rapport du médecin légiste de l’ambassade !  Dans sa déposition devant le juge d’instruction, le jeune médecin amené à l’hôpital par l’ambassadeur lors de la reconnaissance des têtes, nia avoir rédigé un rapport et affirma même qu’il ne pouvait pas être l’auteur de ce texte qui utilisait des termes techniques qui dépassaient sa compétence.

Que conclure, sinon que la seule chose sage à faire pour le moment est de laisser le juge d’instruction poursuivre son travail en débrouillant tous ces écheveaux plutôt que de mener des enquêtes parallèles qui tiennent plus du roman policier que d’une étude objective des faits.

Armand VEILLEUX

Scourmont, le 19 mars 2011

Quelques citations...

Graines de vie, de paix ...

L’Algérie continue de saigner ! Notre sœur Odette assassinée le 10 Novembre, la 11ème depuis Mai 94 parmi les religieux, religieuses, prêtres !  [il y en aura d’autres !] Continuez de prier avec nous pour que les balles qui ont criblé leur chair soient transformées en graines de vie, de paix, de liberté, de réconciliation, pour le monde et pour l’Algérie en particulier… ! ( 27 janvier 1996, deux mois avant l'enlévement, lettre à des amis.)

Graines de vie, de paix ...

Frère Célestin

Le mystère du Christ

Le mystère du Christ est tellement immense, qu'on a bien le droit d'accorder une préférence à tel ou tel aspect de sa vie, grâce à l'analyse et la méditation que l'on a fait soi-même, et avec d'autres ! – N’était-ce pas un des appels urgents que le concile Vatican II adressait aux prêtres et aux chrétiens ? une Eglise dans le monde, bien incarnée, et non à côté, avec des privilèges et des pouvoirs !...

Pour ma part, donc, je vous avoue être de plus en plus impressionné par le mystère du Christ dans son Incarnation, Lui, l'égal de Dieu n'a pas utilisé ses privilèges de Fils de Dieu, il est devenu en tout l'égal des hommes; et ce n'est qu'au cœur d'une longue incarnation, d'un long enfouissement, jusqu`au bout du don total que peut faire un homme, qu'il reçoit de Dieu l'Esprit de vie pour lui et pour tous ses frères.

Le mystère du Christ

Frère Célestin

Je n'ai pas voulu être un prêtre

Je n'ai pas voulu être un prêtre qui au nom de sa théologie en chambre parle de Dieu à ses frères humains… ! – Mais, par contre, il y avait chez moi, et il y a encore, un besoin profond, un besoin impérieux, d'amour toujours plus vrai, une nécessité d'être avec (et non à côté) les hommes mes frères, en égalité.

Mieux encore, tous ensemble, croyants et incroyants, pratiquants ou non, au cœur d'une vie partagée au long des jours, lentement, progressivement, chercher, rechercher, quel Esprit nous anime, pour continuer les uns avec les autres, concrètement, sur le tas, localement et ailleurs, à construire le monde dans un meilleur esprit de partage, au lieu de rêver dans les nuages l'unité, l'universalité ! ...( mai 1976 alors qu'il quitte la paroisse et devient "éducateur de rues" à Nantes)

Je n'ai pas voulu être un prêtre

Frère Célestin

Merci pour votre charité

Merci pour votre charité, sollicitude, prière…, d'être près de nous, près de notre Église…, etc.

...Pour le moment le Seigneur me donne d'être là avec les frères, paisiblement… et, en ces temps difficiles, je reste émerveillé devant le don de Dieu, de vivre ma vie monastique (bien pauvrement) ici, avec ces dimanches, solennités, fêtes … et remarque qu'à chaque réflexion communautaire jamais la parole de Dieu - celle du jour même - ne m'a autant parlé pour poursuivre ma route … comme il y a dix ans lorsque je projetais de venir ici. Puissé-je toujours avoir un cœur prêt à l'accueillir.

Continuez de prier pour nous, car le plus dur sera dans l'avenir… (lettre à l'abbaye de Bellefontaine,1985)

Merci pour votre charité

Frère Michel

Bientôt un an...

Bientôt 1 an dans la maison de l'Islam... L'Église ici a vécu plus d'événements douloureux que joyeux apparemment, et en même temps nous sommes témoins d'autre chose… et là, faut-il parler du mystère de l'Église ? du mystère du peuple de Dieu ? en tous cas sûrement du mystère de Dieu, d'un dessein de Dieu dans la maison de l'Islam … où le silence, la prière vaut mieux que le partage - surtout l'émerveillement comme Jésus sous l'action de l'Esprit : " Je te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d'avoir caché cela aux sages et aux habiles et de l'avoir révélé aux tous petits. Oui, Père c'est ainsi que tu en as disposé dans Ta bienveillance…" Et le Prophète dit : " Seigneur, accrois mon émerveillement devant Toi." (lettre à un cousin, août 1985)

Bientôt un an...

Frère Michel

C'est dans l'insignifiance de sa vie

C'est dans l'insignifiance de sa vie que le moine se veut et qu'il se sait "SIGNE". ( juin 1974, "l'Invincible Espérance" p.24)


Je sais n’avoir que ce petit jour d’aujourd’hui à donner à Celui qui m’appelle pour TOUT JOUR mais comment lui dire oui pour toujours si je ne lui donne pas ce petit jour-ci… Dieu a mille ans pour faire un jour ; je n’ai qu’un seul jour pour faire de l’éternel, c’est aujourd’hui ! (Chapitre du 30 janvier 1990)


Notre mort est incluse dans le don, elle ne nous appartient pas, et donc elle ne peut être risquée que dans le même climat d’Évangile que tous nos autres instants offerts à Dieu au sein de cette communauté monastique à laquelle nous sommes liés d’amour à la vie à la mort ou encore pour le meilleur et l’au-delà du moins bon.

C'est dans l'insignifiance de sa vie

Frère Christian

Seule la charité

"Seule la charité peut nous révéler le "bon angle" des choses et des événements... de tous ces petits "signes des temps" dont la vocation unique est de murmurer Dieu." (juin 1974, "l'Invincible Espèrance",p.25.)


"Aller vers l'autre et aller vers Dieu, c'est tout un, et je ne peux m'en passer, il y faut la même gratuité" (septembre 1989, "Sept vies pour Dieu et l'Algérie", p.34)


"Dans notre vie, il y a toujours un enfant à mettre au monde, l'enfant de Dieu que nous sommes " ( 8 mars 1996 - "Sept vies pour Dieu et l'Algérie" p.206)

Seule la charité

Frère Christian

Jusqu'au bout, Jésus a été vivant

Jusqu’au bout, Jésus a été un vivant. Notre existence : celle de moines. Nous sommes dans des conditions qui nous convertissent et cela nous conduit vers des raisons plus profondes de rester, une façon plus vraie et plus dépouillée. (Août 1993)

Jusqu'au bout, Jésus a été vivant

Frère Christophe

Ma présence ici

Ma présence ici n’est pas nécessaire mais peut être utile. Le 31 janvier 96, j’aurai 82 ans, je suis malade, cœur et poumons, mais tant qu’il reste un peu de jour, dans un contexte difficile, je me dois aux autres – aussi je ne peux quitter Tibhirine. « Que ton règne vienne ». Il ne faut pas rechercher ce qui est « sien ». (lettre du 4 12 95)


Parce qu’elle est une rencontre avec Dieu, la mort ne peut être l’objet de terreur. La mort c’est Dieu. (Lettre du 28 05 95)


Perdre sa vie : le Christ n’existe pas pour lui-même et c’est pour cela que nous trouvons notre salut en existant pour lui ; c’est-à-dire pour ses frères qui sont aussi les nôtres. (8 mars 1994)

Ma présence ici

Frère Luc

Dieu aime ses enfants

Dieu aime ses enfants avec infiniment de respect. C’est pourquoi il les veut libres. Dieu a respecté la liberté de l’homme jusqu’à lui laisser la possibilité de le mettre à mort lorsqu’il s’est fait un des leurs. L’amour ne peut être que la rencontre de deux libertés. Il n’y a pas d’amour dans la contrainte. Dieu sait que notre bonheur ne peut être qu’en Lui, mais il ne peut nous l’imposer. Non seulement il ne le veut pas, mais il en est incapable sinon il ne serait plus ce qu’il est. Il ne serait plus qu’amour. Dieu ne fait que nous proposer son amour. Notre seule action c’est de l’accepter librement, de nous laisser aimer en nous remettant entièrement à lui. Et c’est ainsi qu’il veut que nous aimions: « aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimé. (Tibhirine, 2ème semestre 1990, lettre à sa soeur Bernadette)

Dieu aime ses enfants

Frère Paul

Priants parmi d'autres priants

La première fois qu’une communauté soufie du voisinage a demandé à nous rencontrer – c’était à Noël 1979 – son porte-parole avait bien pris soin de préciser que c’était pour un partage de prière qu’ils désiraient nous retrouver. « Il nous faut laisser Dieu inventer entre nous quelque chose de nouveau. Cela ne peut se faire que dans la prière. » Cette expérience m’aide à ne pas figer le musulman dans l’idée que je m’en fais. (1993)


Priants parmi d’autres priants, c’est ainsi que notre petite communauté monastique, « épave » cistercienne dans un océan d’islam, parvenait à se définir dans l’Algérie indépendante de 1975, alors même que nous avions, semblait-il, huit jours pour quitter les lieux… où nous sommes toujours. (1989)

Priants parmi d'autres priants

Frère Christian

L’islam est né au désert

L’islam est né au désert, comme le monachisme. Il en porte une marque indélibile. Le prophète resta lui-même « enclin à la méditation et au silence ». Et la vie rituelle tend à situer le croyant « seul avec le Seul », même à Mekka quand les pèlerins se présentent par centaines de milliers. Le muezzin qui appelle à la prière s’exprime en solitaire : « Je témoigne… » (Ashhadu). De plus, au sein de l’islam comme dans le christianisme, s’entretient la conscience de n’être, comme Abraham, « qu’étrangers et voyageurs sur la terre… faits pour aspirer à une autre patrie » (He 11,13ss) à laquelle conduisent tous les chemins de désert. (septembre 1989)

L’islam est né au désert

Frère Christian

Donner sa vie pour Dieu

Donner sa vie par amour pour Dieu, à l’avance, sans condition, c’est ce que nous avons fait... ou du moins ce que nous avons cru faire. Nous n’avons pas demandé alors ni pour quoi, ni comment. Nous nous en remettions à Dieu de l’emploi de ce don, de sa destination jour après jour, jusqu’à l’ultime [...] Nous voici ramenés au témoignage de Jésus, à son martyre : Pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis (Homélie pour le Jeudi saint 1994)

Donner sa vie pour Dieu

Frère Christian

Le martyr de l'Espérance

Il me semble que nous recevons là aujourd’hui, comme un surcroît d’appel pour ce « martyre » qui nous est destiné, celui de L’ESPÉRANCE. Oh ! Il n’est ni glorieux, ni brillant. Il s’ajuste exactement à toutes les dimensions du quotidien. Il définit depuis toujours l’état monastique : le pas à pas, le goutte à goutte, le mot à mot, le coude à coude... et c’est cela qu’il faut recommencer, en vie régulière, chaque matin, encore dans la nuit, et cela qu’il faut continuer de ruminer, de corriger, de discerner, d’attendre surtout [...] Et notre « Galilée » à nous, là où nous avons choisi de le suivre, puisque partout, désormais, il est DEVANT, c’est donc ce pays d’Algérie, dans son aujourd’hui pascal. Seule l’espérance peut nous y maintenir à notre place.

Le martyr de l'Espérance

Frère Christian

Dans la situation de Marie

J’imagine assez bien que nous sommes dans cette situation de Marie qui va voir sa cousine Elisabeth et qui porte en elle un secret vivant qui est encore celui que nous pouvons porter nous-mêmes, une Bonne Nouvelle vivante. Elle l’a reçue d’un ange. C’est son secret et c’est aussi le secret de Dieu. Et elle ne doit pas savoir comment s’y prendre pour livrer ce secret. Va-t-elle dire quelque chose à Elisabeth ? Peut-elle le dire ? Comment le dire ? Comment s’y prendre ? Faut-il le cacher ? Et pourtant, tout en elle déborde, mais elle ne sait pas. D’abord c’est le secret de Dieu.

Dans la situation de Marie

Frère Christian

Vivre dans la maison de l'Islam

Il me paraît que vivre dans la « maison de l’islam », c’est sentir concrètement la difficulté, et donc l’urgence plus grande, de ces nouveautés de l’Evangile que l’Eglise n’a extraites de son trésor qu’assez récemment : non-violence pratique, urgence de la justice sociale, liberté religieuse, spiritualité du dialogue, respect de la différence, sans oublier la solidarité avec les plus pauvres, toujours à réinventer. (septembre 1989)

 

Tant qu’il y aura une douleur à partager dans le monde, vous serez là, compagnons de la nuit et du doute, de la veille et des larmes. L’aurore se lèvera pour les autres ; pour vous, elle sera encore prématurée tant qu’il y aura un enfant dans le coma, et des parents effondrés pour qui le temps s’est arrêté au chevet d’un être déjà absent. (1977)

Vivre dans la maison de l'Islam

Frère Christian

Je suis à Lui

Car enfin mes amis

il faut qu’entre nous

cela

soit bien clair

je suis à lui

et sur ses pas je vais

vers ma pleine vérité

pascale ("Aime jusqu'au bout du feu")

Je suis à Lui

Frère Christophe

Devenir serviteur

Je te demande en ce jour

la grâce de devenir serviteur

et de donner ma vie

ici

en rançon pour la PAIX

en rançon pour la VIE

Jésus attire-moi

en ta JOIE

d’amour crucifié ("Aime jusqu'au bout du feu")

Devenir serviteur

Frère Christophe

Ce Noël ne fut pas comme les autres

Ce Noël ne fut pas comme les autres [...] Il y avait nous, chacun ; et les événements qui nous ont immensément rapprochés, n’ont rien gommé des différences. Le matin nous avions convenu qu’il serait idiot de faire bloc. Chacun a vécu ces choses graves. Chacun les interprète. Chacun tâche de les assumer. Et puis, il y a aussi ce « nous » qui chemine, progresse en grâce et en sagesse (!?!). On est déplacé, conduit là où on n’aurait jamais pu aller malgré toute notre religion... Il est grand le mystère de la Foi... de la fidélité plus tendre. Oui, je suis bien ému d’être membre de ce corps, sans éclat ni belle apparence [...] MOINES, on est en train de le devenir un peu plus en vérité, selon l’évangile de notre Seigneur Jésus-Christ. (Relation de frère Christophe, janvier 1994)

Ce Noël ne fut pas comme les autres

Frère Christophe

Amour en Croix

L'office. Les mots des psaumes résistent, font corps avec la situation de violence, d'angoisse, de mensonge et d'injustice. Oui, il y a des ennemis. On ne peut pas nous contraindre à dire trop vite qu'on les aime sans faire injure à la mémoire des victimes dont chaque jour le nombre s'accroît. Dieu Saint. Dieu Fort. Viens à notre aide. Vite. Au secours. Et puis on reçoit des mots d'encouragement, de consolation, des mots qui font espérer et c'est là que lire l'Ecriture c'est vital. Il y a du sens : il est à recevoir, à reconnaître. A reconnaître : toi qui viens. Et nous voici chargés de ce sens. Il s'accomplit : Amour en Croix.

Amour en Croix

Frère Christophe

Ton "Je t'aime"

Aujourd’hui, j’entends au fond de moi ton bonheur d’être en moi : Toi, l’Aimé de l’Amour. L’expérience si pauvre – et dérisoire à en pleurer ou à en rire – de cet étudiant tourangeau disant « je t’aime » sans que nulle réponse ne vienne. C’est ton « je t’aime » m’attirant dans la réciprocité du Don. Ta liberté, Jésus, est liberté d’allure : là où je vais après nous y sommes : il s’agit de le suivre.


Puisqu’il te suffit d’un rien que oui pour faire l’impossible ici s’il te plaît prends moi.

Ton "Je t'aime"

Frère Christophe

Ta ressemblance m'attire

…ta ressemblance m’attire

dedans ta pâque je me suis glissé

et me laisse prendre entièrement à ta vie

ta résurrection m’envahit

par toi s’actualise le don

et tout s’éternise en joie…


Marie nous appelle dans le Verbe

et dans l'Esprit nous laisser aller

Dans la Joie du DON

Vers le Père

Vers nos Frères

Ta ressemblance m'attire

Frère Christophe

Puits que rien n'épuise

C’est toi qui donne forme d’amour à mon existence. Ton je t’aime un jour m’est apparu. Je ne m’en suis pas remis. Je reste au bord de ce « puits que rien n’épuise ». Epuisé. Un jour de Toussaint, j’ai signé sur la feuille officielle ton Je t’aime. Ce qui a lieu ici, c’est une histoire cachée, c’est jeu d’amour ou rien du tout... (12 août 1993)

        

Quand ton corps s’en prend à ma vie.
Quand ton sang y met le feu.

Mon cœur me monte au visage.

Puits que rien n'épuise

Frère Christophe

Après la visite de Noël

Après la visite de Noël, il m’a fallu quinze jours, trois semaines, pour revenir de ma propre mort. On accepte très vite la mort, ne vous inquiétez pas, mais pour reprendre pied ensuite, on met du temps. Après, je me suis dit : ces gens-là, ce type-là avec qui j’ai eu ce dialogue tellement tendu, quelle prière je peux faire pour lui ? Je ne peux demander au Bon Dieu : tue-le. Mais je peux demander : désarme-le. Après je me suis dit : ai-je le droit de demander : désarme-le, si je ne commence pas par demander : désarme-moi et désarme-nous en communauté. C’est ma prière quotidienne, je vous la confie tout simplement. (8 mars 1996)

Après la visite de Noël

Frère Christian

Le pèlerinage continue

Avant que le Seigneur ne me rappelle à Lui, je demande que la Paix s’installe dans ce pays, que j’ai bien aimé et où j’ai passé plus de quarante-sept ans de ma vie. A notre âge, nous nous retournons vers le passé, et nous comprenons le sens de notre pèlerinage sur cette terre. Dans les souffrances du corps et la douleur de l’âme et les échecs, Dieu nous a conduits par la main. Le pèlerinage continue. Devant nous le Christ portant sa croix nous montre le chemin et au terminus brille la lumière pascale de la Résurrection. (10 octobre 1993)

Le pèlerinage continue

Frère Luc

Que le Seigneur me garde dans la joie

Priez pour moi afin que le Seigneur me garde dans la joie. A nouveau notre région est plongée dans les horreurs de la violence. Dieu ne veut pas le malheur. Il se trouve avec les victimes. Dieu avec nous. Je peux poursuivre mon activité. J’ignore quand et comment tout cela finira. Priez pour moi. (15 mars 1996)

 

Ici, la situation est devenue inquiétante, peut-être sera-t-elle pour l’avenir dangereuse... La mort... ce serait un témoignage rendu à l’absolu de Dieu. (Lettre du 17 novembre 1993)

Que le Seigneur me garde dans la joie

Frère Luc

Nous cheminons avec le Seigneur

Aussi longtemps que nous faisons de notre vie un but en soi, ne subsiste aucune raison de vivre, car tout se termine par la mort. C’est dans le Christ que nous découvrons le sens profond de notre vie. Ce que Dieu demande est que nous Lui fassions confiance à Lui et au Christ. (Lettre de janvier 1994)

 

Ici, c’est la confusion et la violence. Nous sommes dans une situation à risques mais nous persistons dans la foi et la confiance en Dieu. Nous cheminons avec le Seigneur. Il nous indique le chemin, c’est par la pauvreté, l’échec et la mort que nous allons vers Dieu ( lettre d’avril 1994).

Nous cheminons avec le Seigneur

Frère Luc

Comme un oiseau sur la branche

Merci de nous suivre par la pensée, au milieu des événements d’Algérie. Une religieuse et un religieux ont été assassinés. Pas de trêve pour la violence. Nous sommes comme l’oiseau sur la branche, prêts à nous envoler vers d’autres cieux ! Des cieux nouveaux et une terre nouvelle. Partout où nous allons, partout où nous sommes, Dieu nous accompagne. Dieu n’est pas contre nous mais avec nous. Quand nous débarquerons de cette planète, encore tout plongés dans nos préoccupations terrestres, nous n’aurons pas peur, car en franchissant le seuil angoissant de la mort, nous trouverons le Christ qui nous introduira dans la maison du Père. (Lettre du 25 mai 1994)

Comme un oiseau sur la branche

Frère Luc

Martyr, c’est un mot tellement ambigu

Martyr, c’est un mot tellement ambigu ici... S’il nous arrive quelque chose – je ne le souhaite pas – nous voulons le vivre ici en solidarité avec tous ces algériens (algériennes) qui ont déjà payé de leur vie, seulement solidaires de tous ces inconnus, innocents... Il me semble que celui qui nous aide aujourd’hui à tenir, c’est celui qui nous a appelés... J’en reste profondément émerveillé : Celui qui nous affermit  avec vous (peuple algérien) en Christ et qui nous donne l’onction : c’est Dieu. (Lettre à un moine)

Martyr, c’est un mot tellement ambigu

Frère Michel

Jusqu'où aller...

Jusqu'où aller pour sauver sa peau sans risquer de perdre la vie. Un seul connaît le jour et l'heure de notre libération en lui... Soyons disponibles pour qu'il puisse agir en nous, par la prière et la présence aimante à tous nos frères.


Que restera-t-il dans quelques mois de l’Église d’Algérie, de sa visibilité, de ses structures, des personnes qui la composent ? Peu, très peu vraisemblablement. Pourtant je crois que la Bonne Nouvelle est semée, le grain germe [...]. L’Esprit est à l’œuvre, il travaille en profondeur dans le cœur des hommes. Soyons disponibles pour qu’il puisse agir en nous par la prière et la présence aimante à tous nos frères. (Lettre du 11 janvier 1995)

Jusqu'où aller...

Frère Paul

"Me voici devant Vous, ô mon Dieu"

... Me voici, riche de misère et de pauvreté, et d’une lâcheté sans nom. Me voici devant Vous qui n’êtes qu’Amour et Miséricorde. Devant Vous, mais par votre seule grâce, m’y voilà tout entier, avec tout mon esprit, tout mon cœur, toute ma volonté» . (Tibhirine, 21/03/90, jour de sa profession solennelle)

 

"Me voici devant Vous, ô mon Dieu"

Frère Bruno

Etre des "Veilleurs"

« Depuis le mois de Janvier, nous accueillons l’un ou l’autre de mes frères qui demeurent en Algérie. Ils viennent pour un temps, pour concrétiser le lien qui existe entre nos deux communautés, et pour trouver un peu de répit dans la grande tension qu’ils connaissent. Notre Prieur (Christian) est venu célébrer la Semaine Sainte et la fête de Pâques avec nous… Célébrer la Résurrection du Christ en cette terre, en cette ville, c’est évidemment un paradoxe, mais nous ressentons alors toute la signification de notre «mission» de priants… Etre des «veilleurs», prenant en notre prière toutes les joies et les peines du monde…» (Lettre - Fès - 07/05/95)

 

Etre des "Veilleurs"

Frère Bruno

"Je remercie le Seigneur d'être ici..."

... et en cet état de vie. C’est simple, caché comme la graine enfouie dans le sol qui germera en son temps. Vie de foi et de grande espérance. Ici comme dans le monde entier, Dieu a jeté la semence de son Royaume, mais tout enfantement a ses douleurs… » (Lettre - Fès - 08/01/96)

"Je remercie le Seigneur d'être ici..."

Frère Bruno

Force et sérénité

 « Vous demeurez tous bien présents dans ma prière qui ne connaît ni le temps qui passe, ni l’espace qui sépare… Et pour chacun, chacune de vous, que le Seigneur vous donne jour après jour force et sérénité… » (Lettre à la famille - deux jours avant l’enlèvement - Tibhirine - 24/03/1996)

Force et sérénité

Frère Bruno